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Mon enfant/petit-enfant fume : que faire ?

La dernière enquête par interview de l’Institut de Santé publique (2013) révèle que 22% de la population des jeunes belges entre 15 et 24 ans fume. 90% des fumeurs (tous âges confondus) ont commencé à fumer régulièrement avant l’âge de 21 ans, l’âge moyen de la première cigarette étant de 16 ans et 2 mois. Ainsi, les données font apparaître que le tabagisme est un problème qui débute tôt dans la vie et qui affecte fortement les jeunes. Que faire face à ce constat ? De nombreux parents ou grands-parents se sentent démunis face à la consommation des ados et cherchent des réponses à leurs questions sur ce qu’il conviendrait de dire ou de faire.

Bien que les quelques pistes développées dans cet article ne pourront faire disparaître ni le tabac, ni le cannabis, ni la chicha de la vie de vos jeunes, elles peuvent néanmoins vous guider dans votre projet d’aborder le sujet avec eux et de les encourager à agir.

 

La dépendance, c’est quoi ?

Peut-être est-ce là l’une des premières questions à vous poser si vous souhaitez tenter un dialogue autour de la consommation de tabac auprès des jeunes. Comme base de la discussion, vous pouvez commencer par vous appuyer sur leurs propres représentations (« Pour toi, être accro, c’est quoi ? ») afin de les mettre ensuite en regard de données objectives. A ce propos, voici quelques informations élémentaires à retenir pour parler tabagisme et assuétude avec vos enfants ou petits-enfants…

Ayez d’abord à l’esprit qu’usage et dépendance ne se recouvrent pas nécessairement… Par ailleurs, si l’on excepte les drogues ciblées habituellement (psychotropes, opiacés, tabac, alcool, amphétamines, benzodiazépines, etc.), il existe bien d’autres types de consommations pouvant engendrer une forme de dépendance, que cela soit lié à des produits (certains aliments comme le sucre, le chocolat, le sel, les aliments gras, les sodas, etc.), ou encore à des habitudes du quotidien et objets d’utilisation courante (voiture, confort moderne, jeux, écrans, GSM, etc.). Il ne s’agit donc pas de stigmatiser un produit ou une personne mais plutôt de s’interroger à propos d’un usage, son contexte, ses avantages et inconvénients (cela participe-t-il pleinement à mon bien-être ou cela constitue-t-il en définitive un frein à celui-ci ?). Par ailleurs, le fait de pouvoir comparer la dépendance au tabac à d’autres formes de dépendances éventuelles, dont certaines qui le concernent de manière concrète (GSM, jeux vidéos, etc.), peut aider le jeune à mieux cerner le processus dans lequel il se trouve impliqué.

 

Une consommation quotidienne de tabac (minimum une cigarette par jour) conduit à un état de dépendance, sachant que la frontière entre usage occasionnel et régulier est très mince et que le jeune peut insidieusement basculer de l’un à l’autre. Lorsque l’assuétude s’installe, un certain nombre de changements chez le consommateur sont observables, le plus flagrant étant l’impossibilité de résister au besoin de consommer. Mais la dépendance se caractérise aussi par l’accroissement d’une tension interne avant la consommation habituelle, un soulagement ressenti lors de la prise de la substance ainsi qu’une accoutumance au produit (besoin d’augmenter le dosage pour maintenir l’effet ressenti initialement). Ou encore : une perte de contrôle de la consommation, des tentatives d’arrêt infructueuses, du temps passé à se procurer et à consommer la substance, l’abandon d’autres activités habituelles, et le recours au produit malgré la connaissance des conséquences négatives de son usage. Enfin, quand il y a cessation de la consommation, l’état de dépendance donne lieu à un syndrome de sevrage (besoin urgent et pressant de fumer, humeur déprimée, insomnies, irritabilité, anxiété, difficultés de concentration, nervosité, augmentation de l’appétit).

 

Quelques informations sur le tabac, ses dérivés et produits associés

Le tabac est un produit constituant un véritable risque pour la santé du fumeur et de son entourage (fumeurs passifs). Voici quelques exemples de risques encourus par le fumeur : cancers, maladies cardio-vasculaires, caries (par la modification de la fonction protectrice de la salive), altération du goût et de l’odorat avec tendance dès lors pour le fumeur à manger plus épicé ou saucé…

On relève de 400 à 600 additifs dans les produits du tabac, dont certains ont pour rôle de faciliter l’absorption de la nicotine et sa diffusion vers le cerveau, ce qui augmente son pouvoir addictif (dans le tabac, la nicotine est la substance qui crée la dépendance). Par ailleurs, lorsqu’on fume du tabac, sa combustion produit du monoxyde de carbone (CO), composé toxique constituant un risque pour la santé, notamment au niveau cardio-vasculaire…

Le tabac à rouler, moins coûteux, est plus nocif que les cigarettes industrielles. Ce tabac tassé plus irrégulièrement que celui d’une cigarette industrielle, brûle moins bien et produit dès lors plus de toxicité (taux plus élevé de CO).

Le joint (tabac mélangé à du cannabis) est encore plus nocif que la cigarette. La fumée produite contient les toxiques du tabac et du cannabis. De plus, le volume inhalé est jusqu’à quatre fois plus important car les bouffées et le blocage de la respiration ont tendance à être plus longs (quantité plus élevée de CO et de goudron dans les poumons).

La chicha, elle aussi, est plus dangereuse pour la santé que le tabac. Elle se compose d’un  fourneau destiné au tabac et de deux tuyaux flexibles dont l’un est relié à un vase à moitié rempli d’eau et l’autre est utilisé comme siphon à fumer. En raison d’une température de combustion plus basse, le CO est produit en plus grande quantité. De plus, le volume de fumée inspirée est beaucoup plus important.

La cigarette électronique reproduit la forme et parfois jusqu’à l’esthétique d’une cigarette classique. Elle fonctionne sans combustion et est conçue pour simuler l’acte de fumer. Jetable ou rechargeable, l’e-cigarette est composée d’un réservoir contenant l’e-liquide (ou la recharge d’e-liquide) ainsi que d’une batterie et d’un atomiseur permettant la production de vapeur chaude. Différents arômes sont commercialisés dont celui de tabac. Bien que ce système fonctionne sans combustion et engendre à ce niveau une notable réduction des risques, l’éventuelle nocuité pour la santé n’a pas encore pu être clairement mesurée. Par ailleurs, lorsque l’e-liquide contient de la nicotine, sa consommation crée une dépendance. Enfin, la crainte est de voir la cigarette électronique servir de porte d’entrée à une consommation de cigarettes classiques, notamment pour les jeunes.

 

L’influence des pairs dans la décision de commencer… ou pas

Des études ont montré que l’initiation au tabac est favorisée par la pression du groupe des pairs. En effet, la décision de fumer est le résultat d’un processus psychologique complexe. Ce qui va le déterminer dépend à la fois de la personnalité de l’individu mais aussi de ses « référents » sociaux et de son environnement. Ainsi, le groupe d’amis auquel il appartient (ou voudrait bien appartenir) a une importance capitale aux yeux de l’adolescent. L’avis et le positionnement de ce groupe pourrait bien avoir un rôle-clé dans son choix de fumer ou non.

Toutefois, il semblerait que cette influence joue surtout un rôle dans l’expérimentation du tabac (ou des drogues), moins dans le développement d’une consommation régulière. Ainsi, il est plus utile de présenter aux jeunes les désavantages du tabac que de tenter de les convaincre de ne pas fréquenter un groupe de jeunes qui fument…

Par ailleurs, on sait qu’il existe un lien entre l’influence de l’entourage du jeune et le fait qu’il ne se sent pas bien dans sa peau (ne pas avoir confiance en lui, être en désaccord avec ses parents, …). Un jeune qui tente de s’affirmer sera beaucoup plus sensible à la pression du groupe auquel il appartient…

Il est donc important à la fois de donner au jeune de l’information sur le tabac, mais aussi de susciter la réflexion sur la notion de choix et l’importance de développer des compétences et des attitudes pour se positionner face à la pression des autres. C’est d’esprit critique et de résistance à l’emprise, qui passe par l’affirmation de sa propre opinion, dont il est question ici.

 

Ouvrir le dialogue en donnant la parole à l’ado

Afin de pouvoir dialoguer avec votre jeune et de minimiser le risque de stigmatisation ou de culpabilisation, voici quelques repères pratiques de communication :

  • Mettez de côté le ton « moralisateur » : il est essentiel d’encourager un dialogue d’égal à égal. L’idée d’une telle communication est de laisser place à la réflexion de votre ado, lui permettant ainsi de se sentir considéré et entendu comme une personne à part entière.
  • Evitez l’interdiction et favorisez plutôt l’exploration des motivations que votre jeune aurait à commencer à fumer ou à continuer de le faire. Bien sûr, il est important aussi de partager votre inquiétude, tout en veillant à ne pas envahir son espace de parole.
  • Vous fumez aussi, comment être crédible ? N’hésitez pas à vous servir de votre expérience comme d’un témoignage (comment vous avez commencé, pour quelles raisons, ce que vous feriez si vous pouviez changer quelque chose dans cette histoire, vos tentatives d’arrêt infructueuses et pourquoi celles-ci ont échoué, etc.).
  • N’oubliez pas l’information ! Dans un premier temps, invitez votre ado à exprimer ce qu’il sait sur le tabac et ses dérivés. Complétez ensuite l’information en privilégiant ce qui concerne plus pragmatiquement le jeune (ex : effets à court terme tels que l’odeur, le jaunissement des dents, l’acné, les effets sur la sexualité, etc.).
  • Enfin, intéressez-vous aux connaissances qu’a le jeune des moyens d’aide à l’arrêt. Si nécessaire, transmettez-lui l’information (ex : la ligne gratuite Tabacstop 0800.111.00).

 

 

 

FOCUS : Aborder les manipulations de l’industrie du tabac

Pourquoi continue-t-on à vendre des cigarettes alors que l’on sait que c’est nocif pour la santé ?

De nombreuses études ont démontré que l’industrie du tabac vise les femmes, les minorités et plus spécifiquement encore, les enfants et les adolescents, une clientèle vaste et potentiellement durable dans le temps (« les adolescents d’aujourd’hui sont les consommateurs réguliers potentiels de demain », Philip Morris, 1981). Pour recruter ce public vulnérable, en recherche d’identité, l’industrie a à cœur de donner une image valorisée du fumeur, les poussant ainsi à associer le tabac à des valeurs positives telles que l’intégration, la volonté de s’affirmer en tant qu’individu, l’indépendance. Elle le fait par le biais du placement de produits dans les films, dans les magazines, grâce au sponsoring d’événements sportifs, elle propose des paquets de cigarettes « sympas », des produits dérivés attractifs (sacs, briquets, etc.). Les cigarettes « bonbons » aux goûts doux et sucrés, interdites en Europe depuis 2014, visaient quant à elles à dissimuler l’âpreté du tabac afin de fidéliser les jeunes et de les amener ensuite vers des produits plus forts.

On sait aussi que la nicotine est modifiée pour accroître la dépendance. L’industrie du tabac l’a nié et s’est même parjurée, comme elle l’a fait concernant les effets du tabagisme actif et passif sur la santé. Plus grave encore, c’est elle-même qui organise la contrebande internationale de ses propres produits et finance de faux organismes d’information et de recherche, à qui elle fait faire et dire ce qu’elle veut. Initier une discussion avec les jeunes autour de ces questions permet de partir des intérêts socio-économiques et de valeurs de citoyenneté qui les interpellent souvent.

 

 

Quoi qu’il en soit, l’idéal est d’encourager la réflexion, l’esprit critique et l’autonomie afin que les jeunes puissent donner sens à leurs choix, réduire les risques lors d’éventuelles consommations et ainsi devenir des acteurs responsables de leur propre santé !

 

Carole FEULIEN, Cédric MIGARD, Marika SIMMONS – Chargés de projet pour le FARES


Pour plus d’informations, n’hésitez à télécharger notre brochure « Comment parler du tabac avec votre ado ? » et le dépliant « Chicha, mieux s’informer » sur l’onglet SE DOCUMENTER de notre site www.fares.be.

 

Coordonnées

FARES asbl : Antenne bruxelloise : rue Haute, entrée 290 807A à 1000 Bruxelles (02/518 18 66) - Antenne wallonne : rue Château des Balances 3 bis, 5000 Namur (0474/571 715). service.tabac@fares.be, www.fares.be.

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